Le monde évolue
The world in evolution
Auteurs/Authors : Allegra C.
Résumé :
Le monde évolue en passant par des pôles d'attraction qui varient dans les siècles selon l'endroit où se déplace la puissance économique et culturelle du moment : de la culture grecque à la culture latine puis française, enfin anglo-saxonne.
S'il est vrai que, jusqu'à il y a quelques siècles seulement et pendant environ 2 000 ans, le latin a été l'expression de la science, particulièrement de la science médicale, il est tout aussi vrai que le savoir européen s'exprimait en français. Jusqu'avant la Seconde Guerre mondiale les classes cultivées utilisaient toutes sans exception cette langue néo-latine dans les salons qui comptaient. Même aujourd'hui, la langue des institutions européennes oeuvrant à l'international dans le domaine de la santé publique est souvent le français.
Déjà au XIXe siècle apparaissaient çà et là dans le Vieux Continent les premiers indices d'une culture médicale économisée et cataloguée dans les deux patries qui furent à l'origine de la fondation des États- Unis : l'Angleterre et l'Allemagne.
Mais il n'existait pas de véhicule linguistique déterminant, unique, pour ces informations ; elles étaient donc divulguées dans des revues du continent européen en français, en allemand, en anglais et en italien.
Le berceau culturel reconnu de la Phlébologie est la France et l'Est de l'Italie, et les associations mondiales qui s'occupent de maladies vasculaires ont été fondées en France, comme l'Union Internationale d'Angiologie et l'Union Internationale de Phlébologie.
Le premier signe avant-coureur d'un changement de cap est fourni par l'Union Internationale d'Angiologie qui, depuis quelques années, a changé sa dénomination, devenant l'International Union of Angiology (IUA).
La Phlébologie résiste toujours, et la langue officielle reste le français dans ses statuts et son expression.
Mais voyons quelles sont les raisons qui ont porté à cette transformation et à cette exportation de la culture de l'autre côté de l'océan : le pouvoir économique des États-Unis ; le véhicule de divulgation lié à des revues publiées aux États-Unis auxquelles, pour des motifs réels mais pas toujours, se lie ce qu'on appelle l'Impact Factor, c'est-à-dire le facteur d'impact déterminé par toute une série de facteurs (le poids scientifique des recherches, la régularité de l'impression et de la sortie de la revue, le nombre d'abonnés, l'emploi correct de la langue anglaise) ; la façon de représenter la recherche, qui doit avoir un caractère de fiabilité, de reproductibilité et être vérifiable, auquel j'ajouterais la « simplicité à l'anglaise » qui fait que, pour compter, les Anglo-Saxons commencent par le cinquième doigt et non par le premier comme presque tous les Européens.
Ces règles caractérisent tous les peuples fortement militarisés, à l'intérieur desquels les ordres doivent être compris de la dernière recrue jusqu'aux officiers et doivent être reproductibles et vérifiables pour que les guerres ne se soldent pas par une défaite militaire.
L'économie est entrée violemment dans le secteur de la santé mais le système des soins prend des caractéristiques différentes en Europe et aux États-Unis : en Europe, la Sécurité Sociale représente une priorité et relève du protectionnisme envers les classes sociales les plus défavorisées, auxquelles est cependant reconnu le droit à la santé ; aux États-Unis, l'activité des organismes de prévoyance représente un problème qui n'a jamais été résolu et que chaque administration, démocrate ou républicaine, renvoie continuellement à plus tard. D'autre part, on parle de Qualité de la Vie mais, selon les critères américains de la Sécurité Sociale, celle-ci est reconnue seulement à ceux qui peuvent se la permettre. Dans la culture européenne, la primauté du malade est préservée dans toute son individualité et dans toutes ses variables. Dans la recherche, on part de l'observation clinique pour arriver à la rationalisation, l'observatio atque ratio de l'antique culture médicale.
Nous avons là deux mouvances culturelles différentes, toutes deux intéressantes et pleines de bonnes idées, mais qui doivent reconnaître un dénominateur commun : la langue anglaise.
Il est difficile pour les peuples néo-latins de renoncer à leur propre idiome quand celui-ci a représenté pendant des siècles l'expression de la plus haute culture mondiale.
Il est difficile et pénible pour nous Européens d'accepter la façon de raisonner et d'ébaucher une recherche des Américains mais justement pour cette raison, à cause de notre grand passé récent, nous devons montrer que nous possédons un registre d'apprentissage plus élastique et plus disponible à l'enrichissement. La France a toujours été à la croisée des chemins de la culture et l'Italie est depuis toujours une productrice de culture et de gènes isolés ; c'est pourquoi nous devons reprendre en main les rênes de la production scientifique internationale.
Pour ce faire, il nous faut créer ensemble une logique à conduction européenne et un langage européen absolument plus souple et vivace afin de contrebalancer le pragmatisme anglo-saxon, indispensable par ailleurs. Nous devons mettre en place un circuit européen regroupant les nations avec la plus ancienne tradition phlébologique ; il est nécessaire que nous évitions d'aller à la rencontre des autres cultures dans une démarche amicale, chacun de son côté, si nous voulons devenir des acteurs et non des figurants à la journée. No leadership but partnership.
Professeur Claudio Allegra Président de l'Union Internationale de Phlébologie
Summary :
Le monde évolue en passant par des pôles d'attraction qui varient dans les siècles selon l'endroit où se déplace la puissance économique et culturelle du moment : de la culture grecque à la culture latine puis française, enfin anglo-saxonne.
S'il est vrai que, jusqu'à il y a quelques siècles seulement et pendant environ 2 000 ans, le latin a été l'expression de la science, particulièrement de la science médicale, il est tout aussi vrai que le savoir européen s'exprimait en français. Jusqu'avant la Seconde Guerre mondiale les classes cultivées utilisaient toutes sans exception cette langue néo-latine dans les salons qui comptaient. Même aujourd'hui, la langue des institutions européennes oeuvrant à l'international dans le domaine de la santé publique est souvent le français.
Déjà au XIXe siècle apparaissaient çà et là dans le Vieux Continent les premiers indices d'une culture médicale économisée et cataloguée dans les deux patries qui furent à l'origine de la fondation des États- Unis : l'Angleterre et l'Allemagne.
Mais il n'existait pas de véhicule linguistique déterminant, unique, pour ces informations ; elles étaient donc divulguées dans des revues du continent européen en français, en allemand, en anglais et en italien.
Le berceau culturel reconnu de la Phlébologie est la France et l'Est de l'Italie, et les associations mondiales qui s'occupent de maladies vasculaires ont été fondées en France, comme l'Union Internationale d'Angiologie et l'Union Internationale de Phlébologie.
Le premier signe avant-coureur d'un changement de cap est fourni par l'Union Internationale d'Angiologie qui, depuis quelques années, a changé sa dénomination, devenant l'International Union of Angiology (IUA).
La Phlébologie résiste toujours, et la langue officielle reste le français dans ses statuts et son expression.
Mais voyons quelles sont les raisons qui ont porté à cette transformation et à cette exportation de la culture de l'autre côté de l'océan : le pouvoir économique des États-Unis ; le véhicule de divulgation lié à des revues publiées aux États-Unis auxquelles, pour des motifs réels mais pas toujours, se lie ce qu'on appelle l'Impact Factor, c'est-à-dire le facteur d'impact déterminé par toute une série de facteurs (le poids scientifique des recherches, la régularité de l'impression et de la sortie de la revue, le nombre d'abonnés, l'emploi correct de la langue anglaise) ; la façon de représenter la recherche, qui doit avoir un caractère de fiabilité, de reproductibilité et être vérifiable, auquel j'ajouterais la « simplicité à l'anglaise » qui fait que, pour compter, les Anglo-Saxons commencent par le cinquième doigt et non par le premier comme presque tous les Européens.
Ces règles caractérisent tous les peuples fortement militarisés, à l'intérieur desquels les ordres doivent être compris de la dernière recrue jusqu'aux officiers et doivent être reproductibles et vérifiables pour que les guerres ne se soldent pas par une défaite militaire.
L'économie est entrée violemment dans le secteur de la santé mais le système des soins prend des caractéristiques différentes en Europe et aux États-Unis : en Europe, la Sécurité Sociale représente une priorité et relève du protectionnisme envers les classes sociales les plus défavorisées, auxquelles est cependant reconnu le droit à la santé ; aux États-Unis, l'activité des organismes de prévoyance représente un problème qui n'a jamais été résolu et que chaque administration, démocrate ou républicaine, renvoie continuellement à plus tard. D'autre part, on parle de Qualité de la Vie mais, selon les critères américains de la Sécurité Sociale, celle-ci est reconnue seulement à ceux qui peuvent se la permettre. Dans la culture européenne, la primauté du malade est préservée dans toute son individualité et dans toutes ses variables. Dans la recherche, on part de l'observation clinique pour arriver à la rationalisation, l'observatio atque ratio de l'antique culture médicale.
Nous avons là deux mouvances culturelles différentes, toutes deux intéressantes et pleines de bonnes idées, mais qui doivent reconnaître un dénominateur commun : la langue anglaise.
Il est difficile pour les peuples néo-latins de renoncer à leur propre idiome quand celui-ci a représenté pendant des siècles l'expression de la plus haute culture mondiale.
Il est difficile et pénible pour nous Européens d'accepter la façon de raisonner et d'ébaucher une recherche des Américains mais justement pour cette raison, à cause de notre grand passé récent, nous devons montrer que nous possédons un registre d'apprentissage plus élastique et plus disponible à l'enrichissement. La France a toujours été à la croisée des chemins de la culture et l'Italie est depuis toujours une productrice de culture et de gènes isolés ; c'est pourquoi nous devons reprendre en main les rênes de la production scientifique internationale.
Pour ce faire, il nous faut créer ensemble une logique à conduction européenne et un langage européen absolument plus souple et vivace afin de contrebalancer le pragmatisme anglo-saxon, indispensable par ailleurs. Nous devons mettre en place un circuit européen regroupant les nations avec la plus ancienne tradition phlébologique ; il est nécessaire que nous évitions d'aller à la rencontre des autres cultures dans une démarche amicale, chacun de son côté, si nous voulons devenir des acteurs et non des figurants à la journée. No leadership but partnership.
Professeur Claudio Allegra Président de l'Union Internationale de Phlébologie
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Éditions Phlébologiques françaises.